Alors que jusqu’à présent les appareils e-Ink (tablettes à encre électronique ou liseuses) utilisaient soient des écrans noir et blanc (Carta, basés sur une fine couche de verre, ou Mobius, souples) soit des écrans couleurs de technologie Kaleido. Sur ces derniers, nous avions un écran N&B similaire à celui des liseuses monochromes, sur lequel venait se positionner un écran couleur, de moins bonne résolution. Cela fonctionnait, mais n’était pas sans points négatifs : contraste moins bon, surépaisseur, fond plus gris, latence visible. Avec l’arrivée de la reMarkable Paper Pro, on trouve sur le marché un appareil équipé du dernier né de chez E Ink, le Gallery 3. En quoi diffère-t-il de son prédécesseur ?
Fonctionnement d’un écran Kaleido 3
Un écran Kaleido (écran équipant la plupart des liseuses du marché, comme par exemple celles produites par Kobo) est basiquement un écran de liseuse Carta (la technologie la plus courante, qui reprend le fonctionnement de base des écrans e-Ink) sur lequel est ajouté une couche pour la couleur. Le schéma ci-dessous illustre assez bien le fonctionnement d’un tel écran.
C’est ce qui explique que la couleur d’un écran Kaleido est grisâtre, et surtout que le contraste est moins bon que sur un écran Carta basique : il y a une couche en plus, qui rend possible la couleur mais bloque une partie du rayonnement lumineux, et vient éloigner la couche monochrome. C’est aussi pour cela qu’il est possible que la résolution en N&B soit plus élevée qu’en couleurs : il n’y a pas un panel mais deux panels l’un sur l’autre, un e-Ink, destiné à gérer le noir et blanc, et un filtre couleur, permettant de donner l’impression que ce fond est coloré.
Avec Gallery 3, E Ink propose un produit totalement différent et on entre réellement dans le monde des écrans à encre numérique couleur. En effet, il n’y a qu’une seule couche de couleur, et la résolution est la même pour toutes la palette de couleurs.
Fonctionnement d’un écran Gallery 3
Un écran Gallery 3 n’est pas un simple écran Carta sur lequel on aurait greffé une couche de couleur. A partir de pigments de couleurs, l’écran affiche de nombreuses couleurs, comme représenté ci-dessous :
On retrouve donc bien le fonctionnement d’un écran e Ink : des particules colorées se déplacent à la suite d’une impulsion électrique, quand elles approchent de la surface une certaine couleur est visible. Si, antérieurement un écran à encre électronique étant limité à des nuances de gris, de part la technologie utilisée, ce n’est donc plus le cas. Avec les écrans Gallery 3, on arrive au stade où la technologie de l’encre électronique permet d’afficher de la couleur, de la même manière qu’elle affichait différents niveaux de gris.
Un écran Gallery 3 est-il meilleur qu’un écran Kaleido 3?
Pour répondre franchement, un écran Gallery 3 est bien plus performant qu’un écran Kaleido. Il est clair que s’il était jusqu’à présent possible de conseiller de favoriser le N&B au détriment de la couleur, car celle-ci impliquait une perte de netteté et un contraste moins bon, pénalisant pour lire du texte, ce n’est plus vraiment le cas. En effet, bien que le contraste soit un peu moins bon que sur un écran N&B, la différence est minime et il y a un gain réel qui peut être pertinent pour certains usages (bande dessiné / comics en couleur par exemple, mais aussi documents PDF avec de nombreux graphiques en couleur, difficiles à interpréter sans la couleur).
Cependant, certains appareils sortent à l’heure actuelle avec des écrans N&B, c’est par exemple le cas de la SuperNote Manta. Ratta/SuperNote justifie ce choix par la plus faible épaisseur des écrans de ce type, et leur recherche d’une latence aussi faible que possible. Il peut y avoir du vrai, mais il est probable que la différence de coût joue aussi un rôle dans ce choix. Quoi qu’il en soit, le passage à la couleur de la plupart des appareils du marché ne me semble pas forcément justifié : pour la plupart des usages, un écran N&B peut tout à fait convenir !
Il faut garder à l’esprit que l’entreprise eInk détient le monopole sur la fabrication des écrans de ce type. Elle a tout intérêt à innover, et a breveter les différentes évolutions techniques, afin de rester dominante sur le marché. De leur côté, les fabricants de tablettes à encre numérique et de liseuses peuvent difficilement rester sur une technologie qui n’est pas la dernière, pour des raisons marketing : dès qu’un acteur passe à la couleur, les autres doivent basculer, sous peine de perdre des ventes.
Il s’agit donc avant tout d’un mouvement industriel, poussé par une logique marketing, dans le contexte d’un capitalisme en grande partie monopolistique. La société eInk se doit d’innover, et il n’est pas facile pour les constructeurs de résister à l’introduction de nouvelles technologies leur permettant de se démarquer sur le marché.
On notera cependant que certains constructeurs restent fidèles au N&B, comme SuperNote, que nous avons évoqué précédemment, mais aussi Amazon. En effet, le géant américain propose sa toute nouvelle Kindle Scribe avec… un écran noir et blanc ! Il est probable que les Kindle passent elles aussi à la couleur, mais quand la technologie sera plus mature. En cela, laisser passer Kaleido n’était pas une mauvaise idée, étant donné les changements majeurs survenus entre Kaleido 3 et Gallery 3…
Très intéressant, merci beaucoup pour cet article de qualité !
Avec plaisir, merci pour votre retour!
Franchement ça a l’air moins dégueulasse que Kaleido 3, mais je ne suis pas pour autant convaincu par la couleur sur un appareil de ce type.